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Suites, Courbes et Théories

(une des bannières du Guardian. A utiliser sans modération. Cliquer pour plus)

Si je vous dis « quel nombre vient après 1,2,3, ? » vous allez certainement dire immédiatement « 4 ».

Si je vous dis réponds « non, c’est 5. Quel est le suivant ? » vous allez probablement penser aux nombres premiers et me dire « 7 » (oubliant au passage que 1 n’est pas considéré comme premier, alors qu’il pourrait l’être pusiqu’il ne se divise que par 1 et par lui-même…)

Et là si je vous dis « non, le suivant est 8. Et celui d’après ? » vous allez peut-être vous rappeler de la Suite de Fibonacci, dans laquelle chaque nombre est la suite des deux précédents : 1,2,3,5,8 et donc proposer 13 comme nombre suivant. Si je voulais pousser le bouchon, je pourrais trouver 347 suites de nombres entiers contenant 1,2,3,5,8 et dont beaucoup continuent avec un autre nombre que 13, et répéter l’expérience encore plusieurs fois.

Le point essentiel est qu’il existe une infinité de courbes distinctes passant par des points donnés. Ce qui distingue ces courbes, c’est les points qui ne sont pas donnés, ou pas encore. Ceci est hyper important et super fondamental, rappelez-vous toujours de ça. Par exemple lorsque des financiers vous proposent des placements en vous montrant les belles courbes croissantes de leurs rendements sur les X dernières années, vous les projetez mentalement dans le futur, au risque de vous faire avoir comme ci-dessus.

Ce même principe peut être appliqué aux théories scientifiques. Je me restreins ci-dessous à la physique, mais le raisonnement me semble fondamental dans la démarche scientifique en général.

Si on prend tous les résultats de toutes les expériences scientifiques réalisées depuis Archimède dans sa baignoire jusqu’aux dernières photos de Hubble en passant par la pomme de Newton et l’éclipse d’Einstein et qu’on réduit ces résultats à des nombres* que l’on alignerait sur l’axe du temps, les théories scientifiques proposées pour expliquer les phénomènes observés correspondent à des courbes passant par certains de ces points :

  • celles qui ne passent que par un seul point sont des idées qui ont mal tourné, genre « comme les oiseaux qui volent ont des plumes » (1 fait expérimental) « si je me colle des plumes et que je saute d’une tour, je vais voler … « . La courbe ne passe pas par le point prévu mais par un autre : « sauter d’une tour avec ou sans plumes fait très mal ».
  • celles qui passent par quelques points, mais plus du tout par les suivants, comme la théorie de l’Ether et bien d’autres.
  • celles qui passent par beaucoup de points, et juste à côté de certains autres, comme la gravitation de Newton qui décrit parfaitement la plupart des phénomènes de la mécanique terrestre et céleste, mais est juste un peu fausse pour tout ce qui est très lourd ou va très vite, et très faux pour les petites particules.
  • celles qui passent par au moins la moitié de tous les points connus. La mécanique quantique et la relativité couvrent chacune une bonne moitié de la physique actuelle, avec des points de contact toujours plus nombreux.
  • les « théorie du Tout », qui passent par tous les points mesurés par la physique. C’est beaucoup plus facile que ce qu’on croit car rappelez-vous, il y en a en principe une infinité, parmi lesquelles :

Avant de hurler parce que j’ai osé les mettre toutes à égalité, lisez bien la suite. Certaines de ces théories font des courbes bien lisses et cohérentes, d’autres font des acrobaties et assènent des postulats pour coller à certains points, mais leurs adhérents sont inattaquables : ils ont réponse à tout puisque leur théorie correspond à la perfection à tout ce qui a été observé jusqu’ici.

Le seul moyen de les distinguer, c’est sur les résultats qu’elles prédisent au sujet d’expériences qui n’ont pas encore été réalisées. La gravitation de Newton, la relativité et la mécanique quantique sont des théories extraordinairement fortes pas parce qu’elles collaient aux mesures, mais parce qu’elles se sont révélées capables de correspondre aux expériences menées pendant des decennies après leur formulation.

En reprenant les théories de tout ci-dessus, certaines jouent le jeu scientifique et sont prêtes à être validées ou invalidées prochainement au CERN ou ailleurs. Celles qui postulent un avant-Big Bang ou des univers parallèles sont invérifiables à très long terme, voire définitivement. D’autres nécessitent l’expérience de la mort pour une ultime vérification, mais au moins on saura (ou pas…).

Mais la palme de la démarche anti scientifique revient probablement plus aux catastrophysiciens qu’aux cré(a)ti(on)nistes : en gros ils exigent de ne surtout pas faire d’expérience qui leur donnerait raison, car elle provoquerait une catastrophe définitive. Et évidemment, ils ne proposent pas d’autre expérience permettant de valider leur théorie sans danger. Ca c’est du courage.

*Note : il y a plusieurs manières de faire. On peut faire un « checksum » genre CRC-32 du compte rendu de leurs expériences, ou faire un très grand nombre binaire en mettant toutes les informations à la suite etc.

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