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Découvertes islandaises

Cet été, toute la famille Goulu a eu la chance de visiter un pays extraordinaire : l’Islande. Chaque jour a été l’occasion de découvrir quelque chose d’intéressant, d’étonnant ou de magnifique. Souvent les trois à la fois.

La baleine à bosse

Baleine à bosse
Baleine à bosse, Reykjavik. Photo Julia G.

La baleine à bosse (humpback whale en anglais) nous a souhaité la bienvenue dès le premier jour en effectuant de spectaculaires sauts et en frappant l’eau de ses puissantes nageoires. Ou peut-être protestait-elle contre le massacre de ses congénères jusqu’en 1986 qui a failli causer leur extinction. Ou son soulagement que la population soit en augmentation depuis, passée de 20’000 à 35’000 en 30 ans.

Il faut dire que ce qui passe par la tête de notre cousine mammifère est difficile à décoder : récemment on s’est aperçus qu’elle défendent activement des phoques contre des attaques d’orques, allant jusqu’à leur permettre de monter sur elles pour échapper aux prédateurs.

Le requin du Groenland

Un autre géant de l’Océan Arctique vient de faire parler de lui : le requin du Groenland, dont on a appris qu’il peut vivre 400 ans, ce qui en fait le vertébré à la plus grande longévité connue.

Avant d’aller en Islande je ne le connaissais que par un épisode de « Faut pas rêver » où le journaliste découvre le Hákarl, une redoutable spécialité culinaire:

Malheureusement cet extrait ne comporte pas le passage sur la longue préparation requise pour débarrasser la chair de l'acide urique et/ou de l'oxyde de triméthylamine qui la rend toxique, ni la dégustation du résultat qui ressemble à de l’ammoniaque solidifié, mais cette vidéo est plus complète.

Historiquement les requins du Groenland étaient intensivement pêchés pour produire de l'huile de foie de requin de très bonne qualité pour les lampes à huile, et utilisée aujourd’hui dans certains traitements contre le cancer. Comme la chair était puante et toxique au point d’être mortelle, certains pêcheurs enfouissaient les carcasses dans le sol, mais lors d’une famine des désespérés ont consommé cette viande fermentée* et n’en sont pas morts tout de suite… Ils ont baptisé ça « Hákarl », probablement d’après le bruit produit tout naturellement par la gorge en essayant d’en avaler un morceau…

Y ayant goûté, je dirais qu’avec une curiosité maladive, un estomac de Goulu à toute épreuve et un paquet de chewing-gum extra forts à la menthe pour estomper le goût et les remontées d’ammoniaque persistantes après avoir ingéré deux centimètres cubes de la chose, ça m’a fait penser à un concentré d’essence d’huile essentielle extrait d’une tonne de Roquefort bien fait.

Ceci explique que la production de Hákarl soit très confidentielle, limitée aujourd’hui à une seule ferme-musée qui traite la cinquantaine de requins pêchés « accidentellement » chaque année pour les inconditionnels islandais et les courageux touristes de passage.

Le rift

le parc national de Thingvellir

L'Islande est une île située pile sur la dorsale médio-atlantique, là ou les plaques tectoniques nord-américaine et eurasienne s’écartent de 2 à 3 centimètres par an. Tout au long de la dorsale de nombreux volcans actifs comblent cet écartement en formant une imposante chaîne de montagnes partant du plancher océanique à environ -4000m dont les sommets sont souvent immergés, mais dépassent le niveau de l’océan de plus de 2000m en Islande, mais aussi aux Açores par exemple.

Tout ça devient très concret en visitant le rift de Thingvellir, où plusieurs larges failles parallèles sont bien visibles. Même si ce n’est pas géologiquement correct, on vraiment l’impression d’y voir les continents s’écarter, voire de nager entre eux dans la faille de Silfra

Les tunnels de lave

Tunnel de lave en formation à Hawaï (image Volcano Video Productions)

Dans certaines conditions, la lave sortant d’un volcan se solidifie au contact de l’air en formant un tube solide dans lequel elle peut s’écouler en restant très chaude, fluide. Quand le flux de lave se tarit, il laisse derrière lui un tube creux, un tunnel de lave parfois tout petit, parfois de plusieurs mètres de diamètre et de centaines de mètres de long.

Photo CC Felix Haller sur Flickr
Stalagmites à Vatnshellir Photo Felix Haller sur Flickr (CC BY 2.0)

La grotte Vatnshellir est l’un des rares tunnels de lave  accessibles au public non spéléologue (visite en video)

Formée par le Snæfell il y a 6 ou 8000 ans, elle est bouchée aux deux extrémités et accessible uniquement par une fissure à son plafond. Avant qu’un escalier soit installé pour la visite, Jules Verne avait fait de cette grotte le point de départ de son « Voyage au centre de la Terre ».

La géologie de ces grottes étant très différente de celles des cavernes calcaires plus communes, certains visiteurs sont désappointés : oui les stalactites sont toutes petites. Mais c’est de la roche fondue, voire vitrifiée, Monsieur ! Et les stalagmites sont très fines car elles se sont formées en quelques heures par des gouttes de lave tombant une à une du plafond lorsque le tunnel s’est vidé. Wow !

L’Askja

Askja
Lacs de cratère de l’Askja : Öskjuvatn au fond et Viti au premier plan. Photo Julia G.

L'Askja est le volcan  No 37060 du Global Volcanism Program que je viens de découvrir et où on trouve des infos complètes sur tous les volcans du monde.

Concrètement, l’Askja est un stratovolcan  produisant assez souvent des éruptions de faible indice d’explosivité. En 1875 une éruption plus violente a recouvert une bonne partie de l’Islande de cendres toxiques qui ont détruit les cultures et tué du bétail, forçant ainsi beaucoup d’islandais à émigrer.

Deux lacs se sont alors formés, le plus grand dans la caldeira laissée par l’éruption, un autre dans le petit cratère Viti voisin, où l’eau est  à 25°C. Un vrai délice après 3h de 4×4 sur des routes impossibles traversant plaines désertes, champs de lave et torrents à traverser à gué, plus une petite heure de marche.

Les pseudo cratères

Pseudo-cratères du lac Myvatn, photo Jonas Bendiksen, National Geographic
Pseudo-cratères du Mývatn, photo Jonas Bendiksen, National Geographic

Avec tous ces volcans, pas étonnant que l’Islande soit truffée de cratères, mais dans la région du Mývatn** il y en a vraiment beaucoup. Trop au point d’en être louche. En fait ce sont des pseudo-cratères formés par des explosions de vapeur lorsque de la lave a coulé sur le lac.

Eyjafjallajökull

Vous vous souvenez certainement avoir essayé de prononcer ce nom en 2010 lors de l’éruption qui a immobilisé le trafic aérien transatlantique  pendant des semaines. En fait, Eyjafjallajökull signifie « glacier sur les montagnes proches des îles », pas « volcan à cendres anti aériennes« . Le volcan No 372020 du GVP est sous un glacier, et sous le volcan, il y a une grande ferme où un « Visitor Center » aussi intéressant qu’émouvant raconte cette éruption « vue du dessous ».

Le geyser

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Strokkur, par Julia G.

Un mot islandais plus facile à prononcer, c’est « geyser ». Il vient de « Geysir », nom propre d’un geyser particulier situé dans le champ géothermique du même nom. L’activité de cette mère de tous les geysers a diminué depuis plusieurs années au point qu’il ne propulse un peu d’eau en l’air que très occasionnellement aujourd’hui.

Juste à côté le Strokkur a pris le relais et crache quelques dizaines de litres d’eau bouillante à une vingtaine de mètres de haut toutes les 3 à 5 minutes, soit beaucoup plus souvent que Old Faithful et Steamboat au Yellowstone, USA.

Géothermie et aluminium

L’Islande tire un très bon parti de l’énergie géothermique : 80% des habitations sont chauffées grâce à la chaleur du sol. Les centrales géothermiques et l’énergie hydraulique produisent 5 fois plus d’électricité que nécessaire aux habitants. Un ambitieux « programme hydrogène » prévoyait de faire fonctionner les véhicules, bateaux de pêche compris avec de l’hydrogène électrolysé, mais la crise économique de 2008 a de facto eu raison de ce rêve. Désormais, ce sont d’énormes usines d’aluminium qui stockent plus de la moitié de l’électricité islandaise dans ce métal qui coûtait plus cher que l’or il y a 150 ans.

Et le reste d’électricité et de chaleur permet de faire pousser des tomates hors sol sous serre, avec un éclairage artificiel en plein été …

Les Vikings et l’Amérique

Goscinny avait raison : c
Goscinny avait raison : c’étaient des Normands. En apprenant la peur, ils sont devenus des Vikings et ont exploré le monde.

Historiquement, Asterix a bien connu les Normands, et pas les Vikings. Le terme Viking  désigne un explorateur, commerçant, pillard mais aussi pirate scandinave entre les VIIIème et Xème sièclePar extension, on emploie le terme en français pour désigner la civilisation scandinave à partir de la fin du IIème siècle après Astérix. Avant, les peuples de Scandinavie étaient bien appelés « Normands ».

Grâce à leurs excellents bateaux qu’on n’appelle drakkars*** que depuis 1840, les Vikings ont découvert l’Islande et fondé Reykjavik en 840 déjà, et de là le Groenland vers 980. Il est certain qu’ils ont ensuite poussé jusqu’au Vinland (Terre-Neuve) vers l’an 1000 et ainsi découvert l’Amérique au moins 4 siècles avant Colomb. S’ils avaient eu la curiosité de suivre la côte vers le sud, peut-être que la moitié du monde parlerait islandais aujourd’hui. On l’a échappé belle !

Notes:

* les islandais n’aiment pas qu’on dise « requin pourri », et ils ont biologiquement raison…
** il ne faut pas dire « lac Mývatn », c’est un pléonasme puisque « Vatn » signifie lac. Comme « lac Léman » d’ailleurs.
*** le mot drakkar vient du suédois moderne drekar qui signifie « dragons », certains bateaux vikings ayant eu têtes de dragons comme figures de proue.

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